version PDF

MINIMISER LES ENGORGEMENTS ET LES DÉLAIS JUDICIAIRES : RÉPERTOIRE DE PRATIQUES PROMETTEUSES

Déclaration du Comité d’action

Notre comité existe afin d’appuyer les tribunaux canadiens dans leurs efforts en vue de protéger la santé et d’assurer la sécurité de tous les usagers des tribunaux dans le contexte de la COVID-19, tout en favorisant l’accès à la justice et respectant les valeurs fondamentales de notre système de justice. Ces engagements qui se soutiennent mutuellement guident tous nos efforts. Dans le cadre de son mandat, le Comité cherche à tirer profit des leçons apprises en matière d’innovations liées à la pandémie.

CONTEXTE

Les stratégies efficaces pour lutter contre les engorgements et les délais judiciaires comprennent généralement plusieurs domaines d'intervention. Compte tenu de l'interdépendance des tribunaux, des intervenants de la justice et des autres personnes qui prennent part au processus judiciaire ou en sont touchées, les stratégies fondées sur la collaboration et l'inclusion de divers intervenants s’avèrent souvent les plus efficaces. En combinant des approches qui reflètent chacun des principes fondamentaux et opérationnels décrits dans le document du Comité d'action intitulé Feuille de route vers la reprise : principes d'orientation pour réduire les engorgements et les délais judiciaires, on peut optimiser le succès de ces stratégies en réponse à la pandémie et au-delà. Ces principes sont les suivants :

Principes fondamentaux – pour promouvoir une approche efficace, axée sur les utilisateurs et leurs besoins

  1. Utiliser des stratégies de leadership et de gestion du changement pour réaliser un changement de culture
  2. Répondre aux besoins diversifiés des participants au système de justice
  3. Mesurer et surveiller les délais et les engorgements pour évaluer les progrès et l’efficacité
  4. Favoriser la responsabilisation des parties et de leurs avocats
  5. Encourager et structurer la collaboration entre les divers intervenants

Principes opérationnels – pour optimiser les processus et réduire les engorgements et les délais judiciaires en pratique

  1. Mettre en œuvre d’emblée et de façon continuelle des pratiques de gestion d’instance robustes et uniformes
  2. Favoriser un règlement judiciaire ou extrajudiciaire rapide des différends
  3. Optimiser les pratiques de fixation d’audiences
  4. Éliminer les comparutions inutiles devant les tribunaux
  5. Optimiser les processus de gestion du volume de causes et éliminer les inefficacités administratives
  6. Partager ou mettre en commun les ressources judiciaires

Ce répertoire non exhaustif fournit un aperçu des pratiques prometteuses adoptées par les tribunaux et les intervenants de la justice partout au Canada et qui s'alignent avec chaque principe. Tout en reconnaissant que de nombreuses solutions pour remédier aux engorgements et aux délais judiciaires se situent au-delà du système judiciaire, ce répertoire se concentre sur les processus liés aux tribunaux afin d'améliorer le traitement et le règlement rapide d’instances nouvelles ou déjà entamées devant les tribunaux. Certaines pratiques existaient avant la pandémie et se sont avérées efficaces pour faire face à la crise, alors que d’autres représentent des innovations adoptées ou élargies en réaction à celle-ci. Certaines pratiques peuvent aussi illustrer une combinaison de différents principes. Au fur et à mesure que des pratiques prometteuses continuent d'émerger, le Comité d'action invite les tribunaux et les intervenants de la justice à transmettre tout autre renseignement d'intérêt à l'adresse suivante : AC-secretariat-CA@fja-cmf.gc.ca.

PRINCIPES FONDAMENTAUX

1. Utiliser des stratégies de leadership et de gestion du changement pour réaliser un changement de culture

La mise en œuvre de stratégies pour réduire les engorgements et les délais judiciaires peut nécessiter des changements importants et rapides. L'adoption d'une approche de leadership et de gestion du changement pour examiner les processus existants, définir les objectifs clés et les options d'amélioration, inclure les parties prenantes dans le processus et soutenir un changement progressif peut améliorer les taux de réussite.

  • Pendant la pandémie, plusieurs tribunaux ont mis en œuvre des projets pilotes à petite échelle pour tester de nouvelles pratiques et procédures en collaboration avec des partenaires du secteur de la justice, avant de les évaluer, de les ajuster et finalement de les étendre à d'autres régions ou contextes. Plusieurs exemples de projets pilotes sont répertoriés dans le présent document, sous différents principes.
  • Afin de gérer la fatigue liée au changement chez les membres de la magistrature touchés par la numérisation rapide des activités judiciaires en réponse à la pandémie, la juge en chef du Cour du Banc du Roi de l'Alberta a organisé une série de petites séances pour entendre leurs préoccupations et leurs suggestions. La Cour a ensuite distribué aux participants un rapport résumant les conclusions de ces séances.

2. Répondre aux besoins diversifiés des participants au système de justice

Il est essentiel d'anticiper et de répondre aux besoins des participants au système de justice qui font face à des obstacles particuliers d’accès à la justice, afin de promouvoir le traitement rapide et efficace de leurs instances judiciaires et de minimiser le fardeau administratif pour toutes les parties prenantes concernées. Les participants touchés peuvent comprendre, entre autres, les justiciables non représentés, les membres de différents groupes marginalisés et les populations surreprésentées dans le système judiciaire : le Comité d’action aborde cette question dans sa publication sur L'incidence disproportionnée de la pandémie de COVID-19 sur l'accès à la justice pour les personnes marginalisées. Bien que les obstacles soient nombreux et puissent s’étendre au-delà des tribunaux—tout comme les solutions correspondantes et les personnes ou organismes qui les mettent en œuvre—ce répertoire met en lumière des exemples d'initiatives visant à répondre aux besoins de certains groupes défavorisés dans le cadre du processus judiciaire.

Les justiciables non représentés

Les peuples autochtones

  • Pour remédier à la surreprésentation des enfants et des parents autochtones et réduire les délais dans les affaires liées à la protection de l'enfance, la Cour du Banc du Roi du Manitoba a lancé un nouveau modèle de protection de l'enfance à Winnipeg en 2017 et l'a étendu à toute la province en 2019. Au cours de la première année, un processus amélioré de traitement des affaires comportant des échéances strictes a permis de résoudre environ 80 % de ces affaires à l’aide d’une seule comparution, la plupart des cas non résolus étant soumis à une seule conférence préalable au procès et résolus lors de celle-ci. Ce modèle a favorisé un changement de culture selon lequel les parents—généralement accompagnés d’un avocat—sont davantage amenés à participer et mieux préparés au processus. Ce modèle a permis d'obtenir des résultats améliorés et plus rapides pour les enfants et les familles et, pendant la pandémie, il a aidé le tribunal à éviter les engorgements et les délais dans les affaires liées à la protection de l'enfance.
  • Dirigé par le BC First Nations Justice Council, le Centre virtuel de justice autochtone de la Colombie-Britannique (lien en anglais seulement) a été récemment lancé pour fournir gratuitement des références juridiques et, dans certains cas, une assistance juridique aux justiciables autochtones impliqués dans des instances criminelles ou de protection de l'enfance, dans le but de réduire leur surreprésentation dans ces domaines du système judiciaire. En complément des services offerts en personne dans ses trois centres actuels, le centre virtuel offre des services à distance aux populations autochtones vivant dans des communautés mal desservies à l’échelle de la province. Une personne de liaison met les clients en communication avec des avocats pour les aider dans leurs procédures juridiques et judiciaires.

Les minorités linguistiques

  • La Cour du Banc du Roi de l’Alberta a récemment lancé un projet pilote pour mieux identifier les besoins en matière de langue française et y répondre de façon plus proactive dans les processus judiciaires en matières criminelle, civile et familiale. En particulier, la Cour a :
    • ajouté à son site Web un formulaire électronique simplifié pour demander un procès ou un autre type d’audience en français;
    • introduit dans toutes ses salles de mise en accusation criminelle un enregistrement audio joué au début des procédures, qui explique en anglais et en français le droit à un procès dans l’une ou l’autre des langues officielles afin de promouvoir une offre proactive;
    • appuyé la formation du personnel sur les droits linguistiques;
    • créé le nouveau poste d’« avocate-conseil des services en français et interprètes » à même les ressources existantes. Cette dernière est chargée d'assurer la liaison avec la Cour, les interprètes, les avocats et les justiciables, les médias et le public pour fournir des services en français ou bilingues, ainsi que de recueillir des statistiques pertinentes et de préparer des rapports périodiques sur les besoins en langue française.
  • Les minorités linguistiques peuvent également comprendre des locuteurs de langues autochtones et d'un large éventail de langues ou de dialectes provenant du monde entier. Pour une analyse détaillée de l'incidence de la pandémie sur les besoins des usagers des tribunaux appartenant à des minorités linguistiques, ainsi qu’un exposé des pratiques exemplaires connexes, veuillez consulter le document du Comité d'action sur L'incidence de la pandémie de COVID-19 sur les besoins d'interprétation et de traduction des usagers des tribunaux.

Les personnes en situation de handicap

  • Chaque palais de justice géré par le ministère du Procureur général de l’Ontario compte un ou plusieurs coordonnateurs de l’information sur l’accessibilité qui travaillent avec les usagers des tribunaux ayant un handicap, ainsi qu’avec les personnes ou les organismes qui les appuient, pour déterminer les mesures d’adaptation appropriées pour leur permettre d’accéder aux services judiciaires et de participer aux audiences. Les demandes d’adaptation peuvent être présentées aux coordonnateurs de la façon la plus pratique et accessible pour la personne concernée (soit en personne, par lettre ou par courriel, par téléphone, par relais Bell ou vidéo). Parmi les mesures courantes, on note les appareils d’aide à l’écoute, l’interprétation gestuelle, le sous-titrage en temps réel, l’adaptation des salles d’audience, les horaires adaptés et les documents en formats de rechange ou accessibles. Au besoin, d’autres demandes seront également prises en considération. Si une mesure d’adaptation est requise pour une audience, le fonctionnaire judiciaire chargé de l’affaire pourrait devoir l’approuver. On demande aux personnes de préciser leurs besoins le plus tôt possible avant l’audience, afin de pouvoir prendre des mesures d’adaptation en temps utile et d’obtenir les approbations nécessaires, le cas échéant.
  • Créé en 2007, le Comité d'accessibilité aux tribunaux de l'Ontario (CATO) a pour mandat de fournir des idées, des renseignements et des conseils pour rendre les tribunaux de l’Ontario plus accessibles aux personnes handicapées, le tout afin de promouvoir un système judiciaire accessible et exempt d’obstacles. Le CATO a poursuivi son travail tout au long de la pandémie. Ses membres comprennent des représentants de la magistrature de tous les niveaux de tribunaux, du Barreau de l’Ontario, des cadres supérieurs du ministère du Procureur général et des organismes communautaires qui représentent les personnes handicapées.

L’inclusion des genres

  • Plusieurs tribunaux ont récemment adopté des mesures pour encourager les avocats et les autres participants aux audiences à préciser leur titre (p. ex. M., Mme, Mx.) et leur pronom de genre (il/lui, elle, iel) à utiliser dans les procédures judiciaires. Ces mesures visent à promouvoir le respect et l'inclusion des genres et à prévenir les erreurs de genre préjudiciables aux personnes concernées. Elles contribuent aussi à simplifier le processus judiciaire en prévenant les hypothèses erronées sur le genre qui pourraient entraîner des distractions ou des erreurs involontaires au dossier de la cour. À titre d’exemples, veuillez consulter les directives de pratique de la Cour provinciale et de la Cour suprême de la Colombie-Britannique (liens en anglais seulement), des Cours d'appel du Manitoba, de la Nouvelle-Écosse (lien en anglais seulement) et de l'Ontario, et de la Cour suprême du Yukon.

Considérations spéciales liées à la technologie

  • La Cour d'appel de Terre-Neuve-et-Labrador offre une clinique mensuelle d'assistance juridique(lien en anglais seulement) pour les justiciables non représentés, soutenue par des avocats bénévoles. En réponse à la pandémie, ces avocats ont étendu leur usage des technologies (telles la vidéoconférence et la téléconférence) pour rencontrer les usagers de la clinique. Tant les avocats que les usagers ont trouvé cette approche virtuelle commode, et l’usage de ces technologies se poursuivra au-delà de la pandémie.
  • Pendant la pandémie, la Cour supérieure de justice de l'Ontario a tiré parti des ressources technologiques pour atténuer les effets de l'accès réduit en personne aux tribunaux sur les justiciables non représentés et les personnes vulnérables. En vue d’améliorer l’accès aux services juridiques et autres pour les justiciables non représentés en matière familiale, la cour a développé une ligne d’assistance téléphonique d’urgence en collaboration avec le Barreau de l'Ontario. En vue de soutenir les parents qui sont parties à un litige en matière de protection de la jeunesse et de protéger les justiciables dans les affaires familiales comprenant de la violence conjugale, la Cour supérieure de justice et la Cour de justice de l’Ontario ont distribué plusieurs centaines de téléphones portables et de cartes de données obtenus grâce à des dons d'entreprises.
  • À la Cour de justice de l'Ontario, le personnel judiciaire a collaboré avec les services de soutien communautaires, notamment les organismes desservant les Premières nations, les organismes de santé mentale et de supervision de la mise en liberté provisoire et les organisations de jeunes, pour aider les populations autochtones et vulnérables à se connecter aux tribunaux virtuels pendant la pandémie. Ces intervenants ont fourni un accès à la technologie et un soutien en personne dans des lieux hors site, et certains ont effectué des visites à domicile.
  • Pour appuyer les justiciables et les avocats dans les audiences virtuelles, les greffiers adjoints de la Cour d’appel de la Saskatchewan offrent un soutien de liaison pour faciliter l’utilisation de la technologie entourant le dépôt de documents par voie électronique ainsi que la participation aux audiences virtuelles. La Cour a également mis un ordinateur portable et des personnes-ressources à la disposition de ceux qui ont besoin d’un accès à la technologie ou d’un soutien particulier pour participer efficacement aux audiences virtuelles.

3. Mesurer et surveiller les délais et les engorgements pour évaluer les progrès et l’efficacité

Définir les engorgements et les délais judiciaires et mettre en place des systèmes et des indicateurs normalisés pour suivre la progression des dossiers de cour constituent des étapes essentielles pour identifier les tendances, les problèmes et les points à améliorer. Ces systèmes et indicateurs jouent également un rôle clé dans l’évaluation de l'efficacité de toute nouvelle stratégie adoptée pour lutter contre les engorgements et les délais judiciaires.

Affaires criminelles

  • Le Comité de modernisation du système de justice pénale de la Cour de justice de l'Ontario publie un tableau de bord annuel qui reflète plusieurs indicateurs de progression des affaires, d'engorgement et de délais. Il comprend notamment des données désagrégées sur l'âge des affaires en instance, les délais de règlement, les taux de règlement à diverses étapes des procédures criminelles et les taux de procès qui n’aboutissent pas. Ces rapports annuels intègrent des données comparatives des 10 dernières années.
  • Les services judiciaires de la Colombie-Britannique (lien en anglais seulement) ont publié un tableau de bord quinquennal qui répertorie le nombre d'affaires criminelles traitées par la Cour provinciale par année fiscale, y compris des données divisées entre les affaires visant des adultes, des jeunes ou des contraventions. De plus, la Cour provinciale de la Colombie-Britannique publie un rapport annuel(en anglais seulement) qui comprend des données sur les nouveaux cas par division de la Cour, ainsi que des données comparatives sur une période de cinq ans.
  • Statistique Canada publie les résultats annuels d’une Enquête intégrée sur les tribunaux de juridiction criminelle. Ces résultats comprennent un tableau de bord annuel sur la progression des affaires criminelles impliquant des adultes et des jeunes accusés dans les tribunaux de première instance partout au Canada. L'enquête a établi des définitions et des indicateurs communs pour mesurer les engorgements et les délais, la charge de dossiers des tribunaux et le traitement des affaires. Elle s'appuie sur les données recueillies par les gouvernements provinciaux et territoriaux responsables de l'administration des tribunaux. Afin de fournir des renseignements plus opportuns sur l'incidence de la pandémie sur les activités judiciaires, Statistique Canada a commencé à publier aussi des données trimestrielles préliminaires en juin 2021.

Affaires civiles, familiales et autres

  • La Cour fédérale publie des statistiques trimestrielles qui répertorient le nombre et les pourcentages de procédures entamées, en instance et réglées par type d'affaire. Ces données comprennent également des données comparatives par trimestre et par année.
  • La Cour d’appel de la Colombie-Britannique publie un rapport annuel(en anglais seulement) qui comprend des statistiques civiles, criminelles et combinées sur les appels interjetés et les décisions rendues, ainsi que des données comparatives sur 12 à 13 ans. De même, la Cour suprême de la Colombie-Britannique publie un rapport annuel(en anglais seulement) contenant des statistiques sur les nouveaux cas ainsi que sur les procès entendus ou reportés en matières criminelle, civile et familiale, y compris des données comparatives sur 10 ans.
  • Statistique Canada publie les résultats annuels d’une enquête sur les tribunaux civils qui permet de suivre des indicateurs clés pour divers types d'affaires civiles et familiales, notamment les affaires en instance et les délais de règlement. L'enquête s'appuie sur les données des tribunaux recueillies par les gouvernements provinciaux et territoriaux. L’enquête sur les tribunaux civils fait présentement l’objet d’un projet de modernisation pour s'assurer qu'elle saisisse les données pertinentes requises pour appuyer l'élaboration ou l'évaluation des politiques, des programmes et des services en droit civil et familial.

4. Favoriser la responsabilisation des parties et de leurs avocats

La magistrature joue un rôle clé non seulement dans la réglementation des processus judiciaires, mais peut-être encore davantage dans la communication et l'application efficace de ces processus. En veillant à ce que les parties et les avocats soient conscients des attentes et tenus de respecter leurs obligations à différents stades, les leaders judiciaires peuvent assurer une progression rapide, juste et efficace des affaires devant les tribunaux. La consultation des parties concernées et des avocats lors de l'élaboration de nouvelles pratiques peut également contribuer à promouvoir leur acceptation et leur respect.

  • Plusieurs tribunaux, dont la Cour fédérale et la Cour d'appel du Nouveau-Brunswick, se sont appuyés sur les comités de liaison existants entre la magistrature et le Barreau pour s'engager auprès des plaideurs des secteurs public et privé lors de l'adoption ou de la révision des procédures judiciaires en réponse à la pandémie. Cette approche peut aider à promouvoir l'acceptation et le respect par le Barreau et à valider l’efficacité de ces procédures en pratique. Elle peut également encourager le Barreau à communiquer les problèmes et les recommandations de manière proactive aux tribunaux, afin d'améliorer la prestation de la justice.
  • En consultation avec le Barreau, la Cour d'appel de l'Ontario a commencé à fournir des liens Zoom pendant la pandémie pour permettre à tous les avocats de participer aux audiences virtuellement, même si leur affaire devait être entendue en personne. Cette pratique a permis de passer instantanément à un forum hybride ou entièrement en ligne, selon le besoin, et d'éviter les ajournements de dernière minute lorsque les avocats ne pouvaient pas assister à l'audience en personne mais étaient tout de même en mesure de participer virtuellement, par exemple s'ils devaient s'isoler ou s'ils ne pouvaient pas voyager en raison des mesures de santé publique. Cette pratique a également favorisé la responsabilisation des parties en renforçant le message qu'en l'absence de circonstances exceptionnelles empêchant leur participation, les audiences se dérouleront tel que prévu.
  • En réponse à des niveaux de préparation inadéquats, la Cour supérieure de justice de l'Ontario a récemment obtenu des modifications aux Règles de droit de la famille renforçant l'obligation des parties de discuter des demandes de divulgation financière non réglées et d'autres questions en litige avant de participer à une conférence relative à la cause ou à une conférence de règlement, afin d'améliorer l’efficacité de ces conférences. Cela comprend l'obligation d'explorer au préalable les domaines d'entente possibles, les options de règlement et certaines questions procédurales. Certaines exceptions s'appliquent, notamment si une ordonnance du tribunal interdit la communication entre les parties ou s'il y a des préoccupations de violence domestique et que la partie abusive présumée n’est pas représentée par un avocat.

Encourager et structurer la collaboration entre les divers intervenants

Puisqu’un grand nombre de personnes sont prennent part au processus judiciaire ou en sont touchées, le fait de travailler en collaboration—tout en préservant l'indépendance judiciaire—s’avère une stratégie clé pour identifier les défis et mettre en œuvre des solutions viables pour lutter contre les engorgements et les délais judiciaires et améliorer l'accès à la justice.

Intervention d’urgence et continuité des activités

  • Bien avant le début de la pandémie, la Cour d’appel de l’Alberta a instauré un plan de préparation aux urgences, y compris une note de pratique officielle désignant les autorités concernées et permettant les extensions de délais. Ce plan contemplait les pandémies et les perturbations liées à l’infrastructure et aux ressources humaines. Forts de cette structure institutionnelle préétablie, la juge en chef et la directrice exécutive / greffière ont pu immédiatement mettre en place une structure d’intervention d’urgence en réponse à la pandémie, composée de deux équipes :
  • une équipe d’intervention d’urgence (ERT) responsable de la planification stratégique et du développement des politiques, présidée par la juge en chef et comptant deux juges puinés ainsi que la directrice exécutive / greffière;
  • une équipe de gestion de l’intervention d’urgence chargée de faire rapport directement à l’ERT et de mettre en œuvre les changements.

Cette structure a permis de faire circuler l’information dans les deux sens, de prendre des décisions rapidement et de mettre en œuvre des politiques et des procédures immédiatement. La Cour a également communiqué directement avec les avocats tout au long de la pandémie en s'adressant à la Law Society of Alberta, à la section albertaine de l'Association du Barreau canadien et à la Société des plaideurs. La légitimité des directives émises par la Cour par l’entremise de ces deux équipes n’a jamais été remise en question.

  • Au début de la pandémie, la Cour supérieure de justice de l'Ontario a convoqué des groupes de travail pour les affaires criminelles, civiles, familiales et les petites créances afin de soutenir la continuité ou la reprise des activités judiciaires. Ces groupes de travail comprennent des membres de la magistrature (y compris des représentants régionaux), du Barreau et du ministère du Procureur général. Ces groupes de travail ont soutenu les efforts visant à élaborer ou à modifier les règles de procédure, les protocoles et les formulaires judiciaires, à mettre en œuvre des processus virtuels, à prioriser les affaires urgentes et à définir des stratégies de modernisation plus larges.
  • Lorsque la pandémie a frappé, l'Association du Barreau de l'Ontario a organisé des réunions hebdomadaires pour promouvoir la communication et la discussion entre tous les niveaux de cour, le ministère du Procureur général, les associations du Barreau de la province et d'autres partenaires du secteur de la justice, notamment l'aide juridique et le Barreau de l'Ontario. Cette initiative a permis aux intervenants de partager des mises à jour et de poser des questions à mesure que la situation évoluait, et a contribué à renforcer les relations de travail. Des réunions ont encore lieu à fréquence réduite pour s'adapter aux besoins actuels.
  • La réponse de la Cour provinciale de la Colombie-Britannique à la pandémie a été éclairée par des consultations régulières avec divers intervenants. Lorsque certaines activités judiciaires ont été temporairement réduites, la Cour a organisé des réunions téléphoniques avec ces intervenants, d’abord quotidiennes, puis hebdomadaires. Les intervenants comprenaient la Cour provinciale et la Cour suprême; le Service des poursuites pénales du Canada; plusieurs unités au sein des ministères provinciaux du Procureur général et de la Sécurité publique et du Solliciteur général; le Bureau du commissaire aux plaintes contre la police; des représentants du Barreau privé et de l’aide juridique; le BC First Nations Justice Council; les bibliothèques des palais de justice de la Colombie-Britannique, et l’autorité provinciale de santé publique.

Les juges en chef adjoints ont également tenu, et continuent de tenir, des réunions mensuelles régulières avec différents intervenants judiciaires en matières pénale et familiale. Dans le contexte pénal, ces rencontres comprennent des procureurs de la Couronne fédéraux et provinciaux; des conseillers juridiques de la cour provinciale; des représentants d’Aide juridique Colombie-Britannique et des avocats de la défense, et la Direction des services aux tribunaux du ministère du Procureur général. Les rencontres en matière familiale impliquent divers représentants des ministères du Procureur général et de la Sécurité publique et du Solliciteur général, du Groupe des avocats du directeur (protection de l’enfance), de l’Association des avocats de l’aide juridique; certains groupes de défense des droits, comme le Rise Women’s Legal Centre et Mediate BC, ainsi que des avocats en pratique privée.

Transformation et modernisation de la justice

  • En Nouvelle-Écosse, la juge en chef de la Cour provinciale siège sur un groupe de transformation de la justice criminelle (CJTG) (lien en anglais seulement) avec des dirigeants du ministère de la Justice, de la police, des poursuivants, des avocats de la défense et de l’aide juridique. Ce groupe recueille et partage des renseignements, identifie des zones d’amélioration possibles, élabore et met en œuvre des projets pour résoudre les problèmes identifiés, et surveille et évalue l'incidence des changements apportés. Dans le cadre de son travail avec le CJTG, la juge en chef a mis sur pied le Groupe de travail sur les pratiques exemplaires liées à la COVID-19 afin d’assurer une réponse coordonnée et efficace à la pandémie et de promouvoir l’accessibilité à la Cour provinciale en particulier. Ce groupe comprenait plusieurs sous-groupes de travail se penchant sur des aspects spécifiques d’approches axées sur la personne et sur la transformation numérique, et abordant notamment les engorgements et les délais judiciaires et les tribunaux virtuels. Le rapport final du Groupe de travail sur la COVID-19 a permis de cerner les leçons apprises, les pratiques exemplaires et les lacunes dans les services, et a été soumis au CJTG afin d’alimenter les décisions futures touchant la Cour provinciale.
  • À l’été 2020, la Cour d'appel, la Cour suprême et les cours provinciales et familiales de la Nouvelle-Écosse ont mis sur pied un comité conjoint, le « All Courts Virtual Court Committee », pour coordonner leur réponse à la pandémie et faciliter le déploiement des technologies virtuelles à tous les niveaux de cour. Le Comité a permis aux membres de la magistrature et aux fonctionnaires de la justice œuvrant dans les secteurs de l'administration des tribunaux et de l'informatique d’échanger sur les besoins et les défis et de travailler ensemble à la recherche de solutions. Le Comité a également soutenu la formation des juges et d'autres personnes sur les nouveaux processus virtuels en utilisant une approche de gestion du changement. De plus, le Comité a mené un projet spécial avec Pro Bono Dalhousie pour recueillir des données sur l’incidence des procédures judiciaires virtuelles sur les personnes et les communautés historiquement marginalisées. Des étudiants ont interrogé des usagers des tribunaux, des avocats et des membres d’organismes de justice communautaire au sujet de leurs expériences afin d’éliminer les obstacles à l’accès aux tribunaux virtuels et de veiller à ce que les besoins des personnes marginalisées soient pris en compte dans les décisions futures sur l’utilisation des tribunaux virtuels.
  • En 2016, la Table Justice-Québec a été créée en tant qu'organisme consultatif pour favoriser la collaboration entre la magistrature et d’autres intervenants de la justice dans la lutte contre l'engorgement et les délais dans les cours criminelles. En juin 2020, cette Table a été convoquée à nouveau pour coordonner la réouverture des tribunaux et aider à réduire les délais en réponse à la pandémie, tout en soutenant les efforts plus larges de modernisation et de numérisation déjà en cours. Les partenaires de la Table comprenaient le ministre de la Justice et procureur général, les juges en chef des trois niveaux de tribunaux, le Directeur des poursuites pénales, ainsi que les chefs du Barreau du Québec, de la Commission des services juridiques et de la Chambre des notaires. En novembre 2020, la Table a publié un plan d'action axé sur une approche centrée sur la personne, afin de promouvoir une justice accessible en matières criminelle, civile, familiale et de la jeunesse. Les recommandations et les stratégies de mise en œuvre étaient axées sur l'optimisation de l'efficacité afin de réduire les délais et les coûts pour les justiciables, la simplification des procédures et la promotion des modes de règlements extrajudiciaires des différends. Trois sous-comités d'experts en droit criminel et quasi-criminel, en droit civil et petites créances, et en droit de la famille et de la jeunesse ont soutenu ce travail.

PRINCIPES OPÉRATIONNELS

6. Mettre en œuvre d’emblée et de façon continuelle des pratiques de gestion d’instance robustes et uniformes

En gérant d’emblée les causes individuelles de manière approfondie, les juges ou les experts juridiques désignés peuvent aborder les questions en litige clairement et explorer les options disponibles dès le début du processus judiciaire, afin d’orienter la cause vers un règlement approprié ou une audience plus ciblée. En faisant respecter les engagements et les obligations des parties de manière cohérente, les officiers responsables de la gestion des causes peuvent également réduire le risque de voir ces causes s'effondrer ou se résoudre à la date de l'audience.

Affaires criminelles

  • La Cour du Banc du Roi de l’Alberta a récemment embauché à Edmonton un avocat retraité de bonne réputation à titre d’officier judiciaire chargé d’effectuer des conférences préparatoires au procès devant juge seul en matière criminelle. Son rôle comprend la fixation d’échéanciers pour les requêtes préalables au procès, l’étude d’options de règlement, et la fixation de conférences préparatoires supplémentaires au besoin. Son expérience antérieure en tant qu’avocat de la Couronne et de la défense a contribué à l’acceptation du processus par toutes les parties concernées. Ce processus a contribué à régler certaines questions en litige avant de la fixation des procès, à améliorer l’efficacité des pratiques de fixation d’audiences et à alléger la charge de travail des juges.
  • Dès le début de la pandémie, la Cour provinciale de la Colombie-Britannique a rendu obligatoire la tenue de conférences préalables au procès (CPP) avant de fixer une date de procès ou d'enquête préliminaire pour les affaires criminelles de longue durée visant des accusés adultes ou adolescents représentés par avocat. L'objectif de cette initiative toujours en vigueur est double: premièrement, réduire le nombre de causes qui ne procèdent pas à la date prévue pour le procès en veillant à ce que seules les causes qui nécessitent réellement un procès soient fixées pour audience ; deuxièmement, réduire le nombre de continuations de procès en veillant à ce que la fixation des procès soit fondée sur une estimation juste de leur durée. La directive de pratique (lien en anglais seulement) applicable énonce les obligations des parties avant et pendant les CPP et comprend une liste de contrôle (lien en anglais seulement) visant à promouvoir une préparation adéquate et un engagement actif dans l'exploration des options de règlement et la gestion des questions liées au procès. La directive de pratique énonce également les différentes mesures que le juge de la CPP peut prendre pour s'assurer que les parties respectent leurs engagements, y compris la préparation d'un rapport de la CPP (lien en anglais seulement) pour le juge du procès. Ce processus a permis d'accroître la communication en temps utile entre la Couronne et la défense, de réduire le nombre de procès et de restreindre la portée des procès qui ont lieu.
  • En réponse à la pandémie, et grâce au soutien financier d'Aide juridique Ontario, la Cour de justice de l'Ontario a mis en place des conférences judiciaires préparatoires au procès obligatoires afin d'explorer les options de règlement dans les instances touchées par la COVID. De mars à juin 2020, ces conférences étaient obligatoires dans toutes les instances où le procès ou l’enquête préliminaire avait été ajournés. De juillet 2020 à octobre 2020, soit lors de la reprise initiale des procès, ces conférences obligatoires ont été étendues à toutes les instances fixées à procès ou pour enquête préliminaire. Ces conférences ont également été encouragées dans d'autres instances. Cette initiative a permis d'augmenter considérablement les taux de règlement et de diminuer le nombre de procès ajournés en raison de la COVID qui ont dû être fixés à nouveau.
  • En septembre 2021, la Cour de justice de l'Ontario a mis sur pied un Tribunal de gestion intensive des causes dirigé par un juge (TGICJ) dans toute la province pour aider à réduire l’engorgement des causes criminelles créé par la pandémie. Le TGICJ fonctionne comme un complément aux tribunaux habituels de gestion d’instance et se concentre sur les causes plus âgées qui exigent une gestion plus poussée avant de fixer un procès ou une enquête préliminaire ou d’atteindre un règlement. Le TGICJ est obligatoire pour toutes les causes datant de 15 mois ou plus, y compris lorsque l’accusé est non-représenté, sous réserve d’une directive contraire du juge régional principal. Ce processus amélioré de gestion d’instance exige que les parties se présentent devant un juge deux mois avant le procès pour confirmer si le procès aura lieu tel que prévu, si les témoins sont disponibles et si la durée estimée du procès est juste.

Affaires familiales

  • À l’initiative de ses juges, la Cour d’appel de l’Alberta avait entamé avant la pandémie des discussions pour étendre son modèle de triage des procédures judiciaires. Cette initiative n’était pas motivée par la pandémie, mais cette dernière en a accéléré la mise en œuvre.

En octobre 2020, la Cour a lancé un projet pilote de conférence d'appel (CA) (lien en anglais seulement) pour tous les appels accélérés en droit de la famille afin de promouvoir l'accès à la justice et le règlement des appels tout en réduisant les conflits familiaux et les dépenses pour les justiciables. Pour aider les parties à participer à ce processus, la Cour a publié un guide du projet pilote (lien en anglais seulement).

Dans le cadre de ce projet, les CA sont obligatoires, confidentielles et non préjudiciables. Elles ont lieu environ deux semaines après le dépôt d'un appel et exigent que les parties déposent un formulaire standardisé (lien en anglais seulement) qui décrit les questions réglées et non réglées et contient une offre de règlement faite de bonne foi. Un juge seul guide les parties de manière informelle à travers un processus en deux parties : une discussion sur le règlement et un volet procédural dans le cadre duquel le juge peut rendre une ordonnance si les parties sont d'accord. La portée d'une CA peut s'étendre au-delà des questions faisant l'objet de l'appel.

  • S'appuyant sur un modèle proposé de tribunal unifié de la famille, la Cour du Banc du Roi de l'Alberta a créé un tribunal de triage des dossiers pour les affaires familiales pendant la pandémie. Des « avocats de règlement » avec une expérience en médiation ont été embauchés pour aider à déterminer les familles les plus susceptibles d'aller à procès et lesquelles sont susceptibles d’envisager un règlement rapide, en vue d’augmenter le taux de règlements et de réduire ainsi le nombre de procès. Les familles qui optent pour un procès reçoivent de l'aide pour élaborer un plan de litige.
  • La Cour supérieure de justice de l'Ontario offre un tribunal d'intervention hâtive pour les affaires familiales dans certains endroits où l'engorgement des tribunaux peut empêcher un accès rapide à une conférence relative à la cause plus complète. Les parties peuvent demander de comparaître rapidement et brièvement devant un juge pour les aider à mettre en place des mesures urgentes ou temporaires sans avoir à présenter une requête urgente. Les parties peuvent également demander des directives procédurales pour déterminer les prochaines étapes et lesquelles d'entre elles doivent être accélérées, le cas échéant.
  • La Cour supérieure de justice de l'Ontario offre également un programme d'agents de règlement des différends (ARD) pour les justiciables en matière familiale dans certaines localités. Dans le cadre de ce programme, des avocats chevronnés en droit de la famille sont nommés à titre de tierce partie neutre pour tenir des conférences relatives à la cause. Ils aident les parties à explorer les options de règlement, à circonscrire les questions en litige et à coordonner les prochaines étapes, comme l'établissement d'un échéancier de divulgation et d'autres exigences préalables au procès. Si un règlement est conclu, il est présenté à un juge pour être entériné. Le nombre de séances d’ARD dans les localités existantes a récemment été augmenté, et le programme a été étendu à trois autres localités.
  • Le modèle de gestion hâtive des affaires familiales de la Cour provinciale de la Colombie-Britannique constitue une approche de règlement des différends familiaux utilisée à Victoria depuis 2019. Ce modèle favorise la tentative de règlement comme première étape du processus judiciaire. Les gens sont aiguillés vers l’évaluation, la médiation et l’éducation parentale plus tôt dans le processus qu’en vertu des règles antérieures du tribunal de la famille. L’expérience de Victoria a montré que cette approche peut aider les familles à résoudre leurs problèmes sans recourir aux tribunaux. Lorsqu’il y a moins de causes devant les tribunaux, les audiences peuvent être fixées plus tôt pour ceux qui en ont besoin. Les plans de mise en œuvre de ce modèle à Surrey et les modifications nécessaires aux Règles de la famille de la Cour provinciale ont été accélérés pour offrir les avantages de cette approche au tribunal de la famille le plus achalandé de la Colombie-Britannique, à compter de décembre 2020. Parallèlement, la Division des services de justice familiale du ministère de la Justice de la Colombie-Britannique offre des renseignements juridiques confidentiels et des services de médiation dans 25 centres — soit des services offerts par téléphone et vidéoconférence dans toute la province afin qu’ils puissent être fournis même aux parents qui résident dans des collectivités différentes.

Affaires civiles

  • Dans les affaires civiles, comme le prévoient ses règles de procédure (lien en anglais seulement), la Cour du Banc du Roi de l'Alberta organise fréquemment des conférences préliminaires de gestion d’instance présidées par un juge. L’objectif est d'aider les avocats à établir un échéancier pour toutes les étapes préalables au procès et à examiner les options de règlement extrajudiciaire des différends dès les premiers stades du processus judiciaire.

Affaires en appel

  • En 2007, la Cour d’appel de l’Alberta a créé le poste d’agent de gestion des cas (AGC) (lien en anglais seulement) pour assurer la liaison entre les tribunaux et les justiciables (ou leur avocat) et pour promouvoir le tri et la progression en temps opportun de ses causes civiles (y compris familiales) et criminelles. Les AGC sont des avocats d’expérience qui tirent leur autorité de la loi, des règles de la cour et de la délégation judiciaire.

Les AGC — soit un à chaque endroit où siège la Cour — appuient la gestion des cas en émettant des directives et des décisions administratives, en fournissant des conseils procéduraux aux avocats et aux justiciables non représentés et en offrant des recommandations ou des options de règlement aux juges relativement à certaines questions procédurales. En particulier, les AGC sont chargés d’examiner chaque appel déposé; de déterminer quand la permission d’interjeter appel est requise; de catégoriser les appels civils pour déterminer quel processus (standard ou accéléré) s’appliquera; d’appliquer ou de modifier les exigences et les délais d’appel; de déterminer quand les appels devraient être radiés; de rétablir les appels sur consentement; de statuer sur les demandes contestées d’ajournement; de régler les différends liés aux ordonnances judiciaires, et de recommander le règlement judiciaire des différends.

En plus de fournir des conseils procéduraux pour simplifier les processus judiciaires, les AGC rendent habituellement plus de 1 000 décisions et directives par année, qui étaient auparavant principalement prises par des juges. La décision d’un AGC peut être révisée par un juge seul, mais les demandes de révision sont rares en pratique. Les AGC jouent également un rôle dans l’administration et les activités judiciaires. De même, ils s’impliquent dans l’élaboration des politiques judiciaires et le soutien de nouvelles initiatives, y compris des projets pilotes.

  • La Cour d’appel de la cour martiale du Canada entend des affaires partout au pays. Avant la pandémie, la plupart des requêtes et des conférences préparatoires à l’audience se tenaient par téléconférence lorsque les avocats n’étaient pas en mesure de comparaître en personne. Pendant la pandémie, ces questions ont été traitées par vidéoconférence, au choix des parties, et avec le juge en chef physiquement présent dans la salle d’audience, ce qui a donné lieu à des échanges plus approfondis qui ont aidé à mieux cibler les enjeux. Cette pratique optionnelle de vidéoconférence se poursuivra vraisemblablement au-delà de la pandémie.

7. Favoriser un règlement judiciaire ou extrajudiciaire rapide des différends

Dans de nombreux cas, le règlement judiciaire ou extrajudiciaire des différends peut s'avérer plus rapide, moins coûteux et plus bénéfique qu’un procès pour les parties à une cause et les autres personnes touchées. La mise en œuvre de processus structurés pour explorer ces options d’emblée et de manière approfondie peut réduire considérablement le nombre de comparutions devant les tribunaux et aider à gérer leur charge de dossiers, tout en réduisant le taux de règlements qui se produisent à la date d’audience. 

Règlement judiciaire des différends

  • En juillet 2020, la Division de la famille de la Cour suprême de la Nouvelle-Écosse a lancé son programme pilote eCourt (lien en anglais seulement), une plateforme en ligne de règlement judiciaire des différends (RJD) où les avocats des deux parties peuvent échanger des textes en ligne et en temps réel avec un juge. Ce projet complète les processus de RJD existants en offrant une option supplémentaire aux usagers du tribunal sur consentement. La nature textuelle de l'échange peut contribuer à réduire les tensions associées au processus judiciaire contradictoire qui pourraient entraver un règlement. La plateforme eCourt est soutenue par un navigateur Web, elle ne nécessite aucun logiciel particulier et elle facilite le dépôt électronique des documents, tout en éliminant les frais de dépôt. La plateforme génère également une transcription automatique de l'échange de texte, y compris de toute ordonnance du tribunal, ce qui peut favoriser la clarté et prévenir les délais dans la détermination des prochaines étapes. Le tribunal continue à ajouter des fonctionnalités au programme et vise à étendre éventuellement l'accès aux justiciables non représentés.
  • Le programme de règlement judiciaire des différends (RJD) de la Cour d’appel de l’Alberta était offert en personne avant la pandémie. Ce projet pilote était axé sur la mise en œuvre de stratégies visant à accroître la participation.

En octobre 2020, la Cour a élargi son programme électronique de RJD (lien en anglais seulement) dans le cadre d'un projet pilote d'un an visant à promouvoir le règlement rapide des affaires familiales et civiles. Le RJD peut être contraignant ou non et peut s'étendre au-delà des questions sous appel. Le RJD était disponible pour toutes les formes d’affaires civiles, mais les réalités de la pandémie ont transposé le processus sur une plateforme Web. Avec la plateforme Web JDR dans les affaires bipartites, les clients et les avocats peuvent se réunir dans leurs bureaux avec tous leurs documents nécessaires et avec les autres parties à distance (ce qui est parfois approprié dans les affaires familiales). D’autre part, la Cour a noté que les avocats qui ont affaire à de multiples parties professionnelles ou industrielles semblent préférer le processus de RJD en direct pour des raisons pratiques. Cette expérience soutient de façon anecdotique l’idée que la plateforme Web JDR ne devrait pas simplement demeurer offerte, mais pourrait bien être adaptable à l’avenir.

  • En mai 2021, la Cour supérieure de justice de l'Ontario a lancé un projet pilote de règlement judiciaire exécutoire des différends dans certaines localités pour favoriser le règlement des affaires familiales, et l'a progressivement étendu à d'autres régions. Le projet offre une option sur consentement aux parties dans les affaires familiales simples afin de résoudre leur cause plus rapidement et à moindre coût - cela comprend les causes où la crédibilité n'est pas en cause et aucune expertise n’est requise. Les parties acceptent de s'engager dans un processus informel dirigé par un juge, qui combine différents aspects d’une discussion de règlement et d’un procès informel, au besoin, où les règles de preuve sont assouplies. Les parties peuvent convenir de régler certaines questions en litige, et le juge décide des questions non réglées sur le fondement des affidavits et des documents justificatifs déposés.
  • En outre, la Cour supérieure de justice de l'Ontario et la Cour de justice de l’Ontario ont récemment modifié les règles de droit de la famille pour permettre aux parties qui ont tenté sans succès la médiation de déposer un certificat de règlement des différends. Cela permet aux parties, avec la permission du tribunal, de combiner une conférence relative à la cause et une conférence de règlement et de sauter certaines étapes préliminaires, à condition que la divulgation soit complète et qu'elles soient prêtes à discuter d'un règlement final de leur cause.
  • En complément des options qu’elle offre depuis longtemps en matière de règlement judiciaire des différends (RDD) dans les instances civiles et familiales, la Cour du Banc du Roi de l'Alberta offre depuis 2018 des conférences spéciales de RDD appelées « SPEC » dans les dossiers fixés à procès pour une durée de trois semaines ou plus. Dans le cadre d'une SPEC, un juge formé et expérimenté en règlement des différends dirige un processus hybride d'une journée qui comprend une médiation judiciaire fondée sur les mémoires déposés par les parties et les renseignements discutés lors de la conférence. Les parties et leurs avocats participent au processus. En plus d'explorer les options de règlement, le juge donne un avis non contraignant sur les questions clés, qui peut déboucher sur une ordonnance contraignante si les parties sont d'accord. Les SPEC se sont avérés un mécanisme efficace pour résoudre des dossiers qui seraient autrement allés à procès et pour réduire la durée des procès qui vont de l’avant.

Modèle hybride

  • En 2019, la Cour du Banc du Roi du Manitoba a mis en place un nouveau modèle de traitement des affaires en droit de la famille afin de promouvoir leur règlement rapide tout en réduisant les frais juridiques et les conflits pour les familles. Ce modèle prévient les litiges inutiles en obligeant les parties à tenter un mode substitutif de règlement des différends avant de s’adresser aux tribunaux, à moins que les contacts entre elles ne soient interdits par une ordonnance du tribunal. Si cette tentative de règlement informel échoue, le modèle favorise une intervention judiciaire hâtive et cohérente pour résoudre les enjeux dès le départ et réduire le besoin d’aller à procès. Cette intervention se fait au moyen d’un processus de triage amélioré suivi, au besoin, d’une conférence de gestion d’instance robuste, le tout étant régi par un juge unique, des échéanciers stricts et des exigences claires pour promouvoir la préparation, la continuité et la responsabilisation. Même avant la pandémie, ce modèle a considérablement réduit le nombre et la durée des procès. Pendant la pandémie, ce modèle a permis au tribunal d’éviter les engorgements et les délais dans les affaires familiales.
  • Le ministère de la Justice du Manitoba offre un service de règlement des litiges familiaux (SRLF) à guichet unique pour aider les familles à régler leurs litiges hors cour ou avant le procès. Ce service aide les familles qui se retrouvent devant les tribunaux à respecter les conditions préalables du nouveau modèle de traitement des causes familiales de la Cour du Banc du Roi du Manitoba. Les soutiens du SRLF comprennent :
  • le calcul administratif hors cour et le nouveau calcul de la pension alimentaire pour la plupart des familles;
  • l’autorité administrative accrue du Programme d’exécution des ordonnances alimentaires (p. ex., suspension administrative de la pension alimentaire; examen de l’admissibilité des enfants adultes);
  • le soutien à la résolution hâtive offert par des guides familiaux spécialisés en violence conjugale, en planification de la sécurité, en médiation et en co-médiation, en évaluations familiales, en activités judiciaires et en services de liaison.

Le nouveau Service des pensions alimentaires pour enfants et le Programme amélioré d’exécution des ordonnances alimentaires ont réduit le nombre de causes portées devant les tribunaux et ont permis de mieux réagir à l’évolution de la situation financière des familles pendant la pandémie.

8. Optimiser les pratiques de fixation d’audiences

En structurant les pratiques de fixation d’audiences de façon à trier efficacement les affaires, à minimiser les temps d'attente pour les participants au système judiciaire et à éviter les pertes de temps pour les juges et le personnel judiciaire, les leaders judiciaires peuvent réaliser des gains d'efficacité significatifs et freiner la propagation ou les incidences de pratiques indésirables qui épuisent les ressources des tribunaux, comme la double réservation par les avocats ou les règlements de dernière minute.

Rôles de triage

  • Dans le cadre de son projet pilote sur les audiences virtuelles de remise en liberté provisoire dans le Nord (lien en anglais seulement), la Cour provinciale de la Colombie-Britannique a prévu un créneau d'une demi-heure au début de son rôle quotidien pour trier les causes avant de procéder aux audiences sur la remise en liberté provisoire. La Cour a également prévu que son rôle de l'après-midi commence plus tôt que la séance régulière des autres tribunaux, afin de permettre aux avocats de la défense de comparaître tout en évitant la double réservation.
  • En réponse à l'augmentation du volume de dossiers dans ses séances de pratique familiale pendant la pandémie et aux nouveaux appels du rôle en mode virtuel, la Cour supérieure du Québec à Gatineau a mis en place un appel préliminaire du rôle commençant une heure avant l'appel régulier afin de trier certaines causes. L'appel préliminaire du rôle traite les demandes d'ajout d'une cause au rôle ou de report d'une cause, et permet aux parties non représentées de s'inscrire tôt pour faciliter leur participation virtuelle lorsque l'appel du rôle commence.

Encombrement stratégique des rôles d’audiences

  • La Cour du Banc du Roi de l’Alberta a mis en œuvre un programme d’encombrement structuré en deux temps, intitulé “Have Gavel, Will Travel”. Dans un premier temps, les procès de courte et de longue durée en matières criminelle et civile sont habituellement fixés en triple alors que les procès devant jury sont fixés en double. Cette démarche vise à éviter que les ressources judiciaires soient sous-utilisées en raison d’ajournements ou de règlements de dernière minute. Dans un deuxième temps, une liste de juges surnuméraires identifie des volontaires qui peuvent être déployés à court préavis pour présider un procès dans n’importe quel centre judiciaire de la province où le surencombrement subsisterait. Ces juges s’engagent à ne pas fixer d’autres causes pendant leur période de disponibilité, de façon à éviter les conflits d’horaires s’ils doivent être déployés à court préavis.

Audiences de mise en état

  • Avant la pandémie, la Cour de justice de l'Ontario a mis en place des audiences de mise en état dans les instances criminelles, exigeant que les parties comparaissent devant la cour huit semaines avant la date de procès fixée pour confirmer qu'elles sont prêtes à procéder. Les parties devaient discuter au préalable des questions à régler et être en mesure de prendre des décisions contraignantes à l'audience, et le juge avait le pouvoir de statuer sur les demandes concernant l’horaire ou le déroulement du procès. Cette initiative a permis de réduire considérablement le taux d'instances qui s’effondrent au procès—que ce soit en raison d'un plaidoyer de culpabilité, d'un retrait des accusations ou autre—et de remplir les listes de procès avec de nouveaux procès lorsque d'autres étaient annulés. Cela s'est avéré particulièrement utile pour fixer des procès à plus courte échéance dans les instances visant un accusé en détention provisoire.

En réponse à la pandémie, la Cour a établi des audiences de mise en état en raison la COVID-19 lorsque les procès ont commencé à reprendre en juillet 2020. Dans le cadre de cette pratique adaptée, les audiences de mise en état ont eu lieu par vidéoconférence ou audioconférence environ une semaine avant le procès, afin de confirmer que les parties sont prêtes à procéder et d’assigner les dossiers aux salles d'audience ouvertes. À l’avenir, la Cour entend examiner combien de temps avant le procès ces audiences devraient idéalement avoir lieu pour minimiser les taux de procès qui n’aboutissent pas.

9. Éliminer les comparutions inutiles devant les tribunaux

Une stratégie-clé pour combattre les délais et les engorgements judiciaires consiste à réduire le nombre et la fréquence des comparutions à ce qui est raisonnablement nécessaire pour faire avancer une cause et en décider. Chaque comparution devrait viser un objectif important et clairement articulé et donner aux parties suffisamment de temps pour se préparer aux prochaines étapes. Dans les processus simples, sur consentement ou purement administratifs, les tribunaux peuvent souvent favoriser et surveiller efficacement les progrès sans exiger que les parties se présentent devant un juge. Une telle approche peut réduire le fardeau de la cour et des parties.

  • La Cour d'appel de Terre-Neuve-et-Labrador a adopté des règles permettant aux parties de présenter une demande écrite de directives ou d'ordonnance dans diverses circonstances. Les demandes peuvent être déposées électroniquement à l'aide d'un formulaire standardisé. Cette pratique a amélioré l'efficacité du tribunal avant et pendant la pandémie.
  • La Cour du Banc du Roi de l’Alberta a récemment adopté un processus de demande écrite (au vu du dossier) avec formulaires électroniques pour les remises par consentement et les nouveaux choix de procès par consentement lorsqu’on ré-opte pour un procès devant juge seul plutôt que devant jury. La Cour a aussi étendu sa pratique de fixation de procès par courriel.
  • Dès le début de la pandémie, la Cour provinciale de la Nouvelle-Écosse et son tribunal pour adolescents ont modifié leurs procédures (lien en anglais seulement) pour permettre aux personnes accusées et aux délinquants de demander la modification sur consentement de leurs conditions de remise en liberté provisoire ou de probation à l’aide d’un formulaire électronique, sans devoir se présenter en personne au tribunal. Des mesures ont été prévues pour informer ces personnes des conséquences possibles du non-respect de leurs conditions. L’aide juridique offre un soutien urgent aux justiciables non représentés qui doivent demander de telles modifications.
  • En août 2020, en réponse à l’engorgement accru des rôles de gestion d’instance causé par les débuts de la pandémie, la Cour de justice de l'Ontario a introduit les désignations améliorées d'un avocat. Ce projet pilote régional a permis de réduire le nombre de comparutions routinières durant les stades préliminaires d'une cause criminelle, et il a été progressivement étendu à d'autres régions. En déposant une désignation améliorée dès les premiers stades du processus et de la gestion d’instance—c'est-à-dire avant la fixation d’une date d’enquête préliminaire ou de procès—l'avocat de l’accusé peut obtenir un ajournement de 12 semaines sans comparution. Cette mesure donne aux parties suffisamment de temps pour préparer leur cause tout en réduisant le volume de causes sur les rôles de pratique et de gestion d’instance, ce qui réduit la charge administrative du tribunal et des parties concernées. Pour favoriser la responsabilisation, les parties doivent s’engager à prendre les mesures nécessaires pour faire avancer leur cause le plus tôt possible, et à saisir le tribunal immédiatement si elles sont prêtes à fixer une audience, si elles ont besoin de faire trancher des questions préliminaires ou si elles parviennent à un règlement. Ce processus a permis de réduire grandement la charge de dossiers et de faire avancer les causes de manière générale.
  • En août 2020, la Cour de justice de l'Ontario a également adopté une directive de pratique qui permet aux avocats de la défense de comparaître au nom d'un accusé en détention pour les demandes de renvoi et d'ajournement lorsque l'accusé renonce à son droit de comparaître personnellement. Cela permet de réduire les délais et le fardeau administratif liés au transport des détenus jusqu’à la cour ou à leur comparution par téléphone ou vidéo depuis un établissement correctionnel. La directive de pratique permet également à la Cour d'ajourner des instances sur consentement en l’absence de l'accusé et de son avocat, à condition que les parties s'entendent sur le motif de l'ajournement et sur la prochaine date de comparution.
  • En février 2022, la Cour supérieure de justice de l'Ontario a introduit des ordonnances automatiques pour les causes familiales. Au début de chaque nouvelle cause, une ordonnance est rendue par voie administrative pour régler les questions préliminaires et les exigences de divulgation financière sans qu'il soit nécessaire de se présenter au tribunal. Ces ordonnances visent à faciliter l’échange rapide de la divulgation financière en vue d’éviter des étapes inutiles.
  • Pendant la pandémie, la Cour suprême du Yukon a commencé à tenir des conférences de gestion d’instance et des conférences préparatoires au procès par voie téléphonique. Cette pratique s’est poursuivie à mesure que les restrictions liées à la pandémie ont été levées, sauf pour les demandes contestées ou celles impliquant un justiciable non représenté. Les avocats apprécient les économies de temps et de coûts. La Cour suprême du Yukon permet également aux accusés qui se représentent eux-mêmes de participer par téléphone à de courtes comparutions liées à la fixation des causes en matière criminelle.

10. Optimiser les processus de gestion du volume de causes et éliminer les inefficacités administratives

Les étapes administratives pour faire progresser les causes au sein du système judiciaire— ou la gestion du volume de causes—consomment souvent du temps et des ressources disproportionnées par rapport à ce qu’elles visent à accomplir. Par conséquent, elles peuvent entraver un accès à la justice opportun, juste et abordable. En identifiant et en éliminant les processus inutiles ou redondants et en simplifiant ou en automatisant certaines étapes routinières, les tribunaux et les leaders judiciaires peuvent réduire la complexité, les coûts et les délais tout en libérant de précieuses ressources judiciaires.

Systèmes électroniques de fixation des audiences

  • Avant la pandémie, la Cour du Banc du Roi de l’Alberta a adopté le King’s Bench Scheduling System (KBBS), soit un logiciel intégré qui permet au tribunal de fixer des audiences sur le fond par voie électronique. Ce logiciel connecte directement aux courriels des juges et aux calendriers judiciaires et facilite ainsi la tâche de vérifier les disponibilités des juges tout en leur fournissant des renseignements en temps utile. Ce logiciel a simplifié les processus de fixation d’audiences et a favorisé une approche cohérente à l’échelle provinciale. Il permet aussi à la Cour de recueillir des données statistiques sur le nombre d’audiences fixées par type à l’échelle de la province, ainsi que sur les délais, les taux de procès qui n’aboutissent pas et les motifs courants d’ajournements et de délais liés aux audiences.

Systèmes de dépôt et de gestion électronique des documents ou des dossiers

  • La Cour d’appel de la Saskatchewan a instauré le dépôt électronique de documents il y a plus d’une décennie. Au début de la pandémie, ce système de classement, jumelé à un déploiement proactif d’audiences virtuelles, a permis au tribunal de passer rapidement à un modèle de travail et d’audiences en ligne. Plus tard au cours de la pandémie, lorsqu’il était approprié du point de vue de la santé publique de le faire, un modèle hybride d’audiences a été adopté. En vertu de ce modèle, les audiences d’appel ont eu lieu avec les juges et le personnel judiciaire dans la salle d’audience, alors que les avocats et les parties ont pu comparaître en personne ou à distance, selon leur préférence. Pour les affaires en chambre ou relatives à la gestion des appels devant un seul juge, les juges et le personnel de la cour ont souvent participé aux audiences à distance et les ont appuyées, et les avocats ont traité de questions brèves par téléphone ou par vidéo. Ensemble, ces initiatives ont permis au tribunal d’éviter les engorgements et les délais judiciaires tout au long de la pandémie, et de réduire le temps de déplacement et les coûts pour les avocats et les justiciables de l’extérieur de la province.
  • Le ministère du Procureur général de l'Ontario a lancé des portails de dépôt électronique complets pour la Cour supérieure de justice dans les affaires civiles, la Cour divisionnaire et les affaires familiales en août 2020 et pour les petites créances en 2021. Afin de promouvoir un accès équitable à ce service, le dépôt en personne reste disponible pour ceux qui en ont besoin, sous réserve des restrictions applicables en matière de santé publique. En septembre 2020, la Cour a également lancé la plateforme CaseLines dans certaines régions, afin de permettre le partage de documents entre la magistrature et les parties en lien avec les causes devant le tribunal. L'utilisation de cet outil a été progressivement étendue à d'autres régions. Pour aider les justiciables non représentés à utiliser CaseLines, la Cour a publié sur son site Web des conseils pratiques, une foire aux questions et des démonstrations vidéo, et elle fournit une assistance téléphonique selon le besoin. Ces mesures ont permis de maintenir l'accès aux services judiciaires pendant la pandémie. Les prochaines étapes porteront sur la recherche d'un système intégré permettant de combiner les fonctionnalités de dépôt électronique et de gestion électronique des documents, afin de promouvoir des gains d'efficacité à plus long terme.
  • Conçu avant la pandémie, le Greffe numérique judiciaire du Québec a été lancé en juin 2020 pour permettre aux avocats et aux parties non représentées de déposer certains documents par voie électronique à la Cour supérieure ou à la Cour du Québec—y compris certains documents introductifs d’instance en matières civile et familiale—et de payer certains frais judiciaires en ligne. Le Greffe numérique judiciaire comprend également un service de dépôt de caution en matière criminelle pour les fins de semaine et les jours fériés. Le portail Web bilingue énonce les conditions d'utilisation, y compris une liste détaillée des documents qui peuvent ou non être déposés par voie électronique. Le portail comprend également des instructions étape par étape pour aider les utilisateurs tout au long du processus, et signale automatiquement tout renseignement manquant. Le traitement est automatisé et comprend une confirmation par courriel du dépôt ou du paiement. Le système rejettera tout document inadmissible et en informera la partie qui tente de le déposer.
  • Plusieurs années avant la pandémie, un comité composé de juges et de personnel judiciaire de la Cour d’appel de l’Alberta a contribué à l’élaboration d’un système de gestion de la Cour d’appel (SGCA).

En août 2020, la Cour a lancé le CAMS, qui permet aux avocats et aux justiciables non représentés de déposer un appel civil ou criminel par voie électronique en tout temps à l’aide des menus déroulants, de payer les frais de dépôt, d’accéder aux documents d’appel et de consulter les prochaines étapes et les échéances pour perfectionner leur appel. Le système automatise également la saisie des données, signale les problèmes nécessitant un examen par les agents de gestion des cas et génère des avis automatiques aux avocats ou aux justiciables aux étapes clés du processus. De plus, le système permet au personnel judiciaire travaillant à distance d’accéder à l’information instantanément, ce qui améliore les délais de service et favorise l’allocation flexible des ressources entre Calgary et Edmonton. Ces progrès ont permis à la Cour de continuer à fonctionner sans entrave malgré les restrictions liées à la pandémie et d’améliorer l’accès à la justice.

Pour assurer sa convivialité, le CAMS a été conçu selon les principes de gestion du changement. Cela comprenait l’examen systématique des processus existants avant leur numérisation, les consultations et les essais préalables au lancement, le déploiement progressif en tant que projet pilote avec une phase de transition, l’élaboration d’outils pratiques comme un manuel d’utilisation avec des instructions étape par étape et des captures d’images, des tutoriels vidéo, des documents de référence et des exemples de documents. La Cour continue d’élargir les capacités opérationnelles internes et les fonctions publiques du CAMS afin de mieux répondre aux besoins opérationnels de la Cour et des parties en appel.

  • En 2004, la Cour d’appel de la Colombie-Britannique a lancé WebCATS (lien en anglais seulement), un système de suivi et de gestion électronique des dossiers encore utilisé aujourd’hui. Il comprend des fonctionnalités destinées au public ainsi qu’à l’administration judiciaire. Les parties peuvent interjeter appel et déposer ou accéder aux documents pertinents par voie électronique, tandis que le personnel judiciaire et les juges peuvent accéder aux détails liés à des cas particuliers. De plus, WebCATS simplifie la fixation des horaires d’appels et la création de documents de cautionnement et de correspondance, saisit les enregistrements numériques des audiences et produit diverses statistiques désagrégées sur les affaires judiciaires, ce qui aide à produire le rapport annuel de la Cour (en anglais seulement). Ce système préexistant a permis à la Cour de continuer à fournir en temps opportun des renseignements et des services judiciaires tout au long de la pandémie, y compris à distance. Ses fonctionnalités continuent de s’élargir pour répondre aux besoins changeants des usagers et du personnel des tribunaux dans un système de justice de plus en plus numérique.

Mise au rôle en ligne

  • Depuis mars 2019, la Cour d'appel et la Cour suprême de la Colombie-Britannique ont progressivement mis en place un système de réservation en ligne (lien en anglais seulement), afin de faciliter la mise au rôle des audiences d'appel dans les affaires civiles et criminelles et de certaines audiences de conférence préalable au procès. Ce système permet aux avocats de demander une audience par voie électronique plutôt que de devoir attendre dans une file d'attente téléphonique, et réduit la charge administrative du personnel judiciaire chargé de fixer les audiences. La Cour suprême continue d’élargir la portée du système de réservation en ligne à d’autres types de procédures judiciaires.

Dépôt de documents

  • La Cour supérieure de justice de l'Ontario a récemment imposé une limite sur la longueur de certains documents à déposer auprès du tribunal dans les affaires familiales, tels que les mémoires de conférence relative à la cause ou de conférence de règlement et les affidavits. Cette mesure permet de mieux cibler les questions en litige et de réduire le fardeau des juges qui doivent examiner des documents volumineux—un fardeau exacerbé par le passage forcé aux processus virtuels.

Prévention et gestion des litiges abusifs ou vexatoires

  • La Cour du Banc du Roi de l'Alberta a assigné un juriste à la gestion des litiges potentiellement abusifs ou vexatoires dans l’ensemble de la province. Ce juriste surveille et gère certaines causes au fur et à mesure qu'elles surviennent, pour documenter le processus de justification quant au bien-fondé de l’affaire et pour identifier les cas évidents de litiges abusifs. Cette intervention hâtive a permis d'alléger la charge de travail des juges en leur évitant de devoir consacrer du temps aux litiges sans fondement.

Soutien procédural aux justiciables

  • Le portail Web du Droit de la famille Saskatchewan, créé par la Public Legal Education Association of Saskatchewan (PLEA), offre une aide gratuite aux justiciables en instance de séparation ou de divorce. L’élément central de ce portail est le « Form Wizard », qui utilise des questions et des explications en langage clair pour aider ces personnes à générer les formulaires judiciaires requis. Cela réduit la nécessité pour ces justiciables de recourir au personnel administratif du tribunal pour obtenir un soutien procédural. Le site web (lien en anglais seulement) de la Cour d'appel de la Saskatchewan comprend un lien vers ce portail et vers des guides pour les justiciables non représentés.

Simplification des processus relatifs aux jurés

  • Pour simplifier les processus administratifs de sélection et d’assignation des jurés, les services de justice du Nouveau-Brunswick ont adopté une approche par étapes. Tout d'abord, ils ont simplifié leurs formulaires standardisés afin d'aider les candidats jurés à les remplir avec plus de précision et d'éliminer les personnes inadmissibles plus rapidement et plus efficacement. Deuxièmement, ils ont instauré un processus de présélection afin d’éviter que les jurés inadmissibles ne soient obligés de se présenter au tribunal, ainsi qu'une audition au préalable pour traiter des exemptions discrétionnaires. Troisièmement, ils attribuent un code-barres individualisé à chaque candidat juré sur leur formulaire d'assignation et de certificat, afin d'automatiser le calcul des frais de juré en fonction des renseignements enregistrés. Ces efficacités procédurales ont permis de réaliser d'importantes économies d’argent liées aux frais de jurés et de temps pour le personnel judiciaire.
  • Afin de réduire au minimum le nombre de personnes inadmissibles qui se présentent au tribunal pour la sélection d'un jury dans les affaires criminelles, ainsi que le fardeau qui en découle pour l'administration des tribunaux, le ministère du Procureur général de l'Ontario envoie chaque année un questionnaire par la poste à environ 700 000 Ontariens afin de vérifier leur admissibilité au rôle de juré.

Simplification des processus décisionnels

  • En 2014, la Cour d’appel du Manitoba a adopté son énoncé de mission visant à rendre des décisions de qualité en temps opportun et a mis en œuvre une analyse de « l’intérêt supérieur de la justice » pour déterminer quelles décisions devraient être rendues sur le banc ou par écrit. Cette approche a considérablement augmenté le nombre de décisions rendues sur le banc, ce qui a donné plus de temps aux juges pour rédiger les décisions prises en délibéré. Cette pratique a aidé le tribunal à maintenir ses normes de service en temps opportun tout au long de la pandémie.

11. Partager ou mettre en commun les ressources judiciaires

Les différents niveaux de cour et les différentes régions judiciaires n'ont pas toujours le même accès aux ressources ni les mêmes contraintes opérationnelles, et la disponibilité de ressources dans différentes sphères peut évoluer rapidement et fréquemment. L’adoption de processus structurés pour identifier les besoins et les possibilités de partage des ressources existantes peut contribuer à réduire les engorgements et les délais et à améliorer l'accès à la justice dans les tribunaux ou les localités insuffisamment desservis, tout en minimisant le gaspillage des ressources judiciaires.

Partage entre les différents niveaux de cour

  • Avant et pendant la pandémie, la Cour d'appel du Nouveau-Brunswick a mis certains membres clés de son personnel à la disposition des autres niveaux de cour de la province, selon leur disponibilité. Cela a permis d'assurer la cohérence et la continuité de services tels que la sténographie, la mise à jour des sites Web, la coordination des activités et les communications. Pendant la pandémie, ce partage de ressources a également aidé les tribunaux à réagir plus rapidement et efficacement dans un contexte en évolution.
  • Confrontée à des restrictions sur les déplacements interprovinciaux et les rassemblements en personne, la Cour d'appel de l'Île-du-Prince-Édouard a pu rapidement passer à des audiences à distance par vidéoconférence et téléconférence, y compris pour les avocats de l'extérieur de la province. Cependant, comme elle partage des installations et une bande passante avec la Cour suprême et la Cour provinciale, les trois niveaux de cour ont conclu un accord quant à leurs horaires pour permettre à chacun de fonctionner efficacement tout en partageant les ressources.

Partage interrégional

  • La Cour provinciale de la Colombie-Britannique a lancé en 2021 un projet pilote dans le nord (lien en anglais seulement) pour mettre à l’essai un modèle centralisé d’audiences sur la mise en liberté provisoire dans des salles d’audience virtuelles. Ce projet pilote fait appel à des juges, à du personnel judiciaire, à des avocats désignés de l’aide juridique et à des poursuivants d’autres localités pour répondre aux besoins des collectivités du Nord. Bon nombre de ces collectivités se trouvent dans des régions éloignées, ont des populations autochtones et sont desservies par des cours itinérantes ou satellites qui ne sont pas dotées de personnel régulier. Les renseignements préliminaires recueillis lors du projet pilote indiquent que la tenue d’enquêtes sur la mise en liberté provisoire en mode virtuel a permis d’éviter de déplacer les accusés loin de leur collectivité, a amélioré l’accès à un avocat, et a permis aux juges des petites collectivités de terminer les procès sans interruption par des enquêtes sur la mise en liberté imprévues. Les responsables du projet continuent de recueillir des données pour déterminer si ces tendances préliminaires se maintiennent.
  • La Cour supérieure du Québec, dans les districts de l’ouest de la province, a su tirer profit d’un juge surnuméraire à l’échelle locale et de juges à la retraite provenant de la région de Montréal pour présider des conférences de règlement à l’amiable (CRA) en mode virtuel pendant la pandémie. Cette mesure a su doubler le nombre de CRA facilitées, et le taux de règlements en mode virtuel s’est avéré semblable à celui associé au mode traditionnel de CRA effectuées en personne.
  • Vu la fermeture temporaire de plusieurs centres judiciaires régionaux causée par la pandémie, la Cour du Banc du Roi de l’Alberta a pivoté vers des audiences à distance dans tous les centres judiciaires. Tirant profit de salles d’audience équipées de technologie vidéo et de greffiers sur place, des juges ont pu entendre différentes demandes virtuellement à partir d’autres régions. Cette mise en commun de ressources régionales a permis à la Cour d’entendre à distance des causes complexes en matière commerciale qui impliquaient plusieurs parties et avocats provenant de divers endroits au Canada (soit jusqu’à 50 personnes ou plus), le tout à coût substantiellement réduit et sans que les juges ni les parties n’aient à se déplacer.